Décamérez ! Suite (j∞)

Du néologisme verbal décamérer : « sortir de sa chambre en restant confiné ». Cinquante-cinquième jour de confinement (aussi connu comme jour infini) : « traversées ».

« (…) cette foule, en moi, tout au fond, à peine visible »

Franz Kafka

(bafouillé)

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i n o u i  –  o u i  o u i  o u i,  o u  n o n  ? e t  o ù  ? o u i,  o ù  ?
h e i n  ?  e t  a p r è s  ?  a p r è s

Décamérez J infini Traversées En attendant Nadeau Nathalie Koble

Paris, Bassin de la Villette, printemps 2020 © Nathalie Koble

Ils étaient 10 (7 + 3). Le séjour dura deux semaines. Puis ils rentrèrent – pour éviter l’envie, la calomnie, la promiscuité. Pour retrouver leur ville, et ceux qui restent.

Ils avaient fui pour la campagne, pour survivre à la catastrophe. Respirer un air pur et salubre et surtout – surtout – s’éloigner du spectacle affligeant et lugubre des horreurs que la peste étalait. Pour un temps, se reposer et penser à la vie, à son imagination délirante, qui fait son lit, son jeu.

50 % de mortalité : on pouvait parler de tout, mais pas de ce chiffre-là. Inventer plutôt une autre façon de compter.

Par exemple, avoir une histoire d’avance (101 = 100).

S’organiser, autrement.

Décamérez ! Suite, traversées (j55, aussi connu comme jour infini)

© Gallica/BnF

Nous n’avons pas tout raconté : il en reste, on peut toujours continuer – multiplier les voix et les chambres d’échos, changer les rythmes, les tonalités, les formats, les langues,

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Et si les livres sont des miroirs, on peut aussi les traverser

Demain, prudemment, traversons

(Nathalie Koble, 10 mai 2020)

Nota bene

Nathalie Koble remercie affectueusement toute l’équipe d’En attendant Nadeau, en particulier Tiphaine Samoyault, Raphaël Czarny, Pierre Benetti et Santiago Artozqui, pour leur hospitalité, leur générosité et la liberté inouïe qu’ils lui ont donnée, contre l’assignation à résidence.

La revue en ligne rend non seulement compte de la vie des livres, mais elle rend possibles d’autres modalités d’existence et ouvre des fenêtres à vues démultipliées, pour d’autres usages. Merci pour ces déplacements, improvisés au jour le jour – ainsi qu’à toutes celles et ceux qui sont venus partager ce quotidien à distance depuis leur chambre, à commencer par les élèves de la première heure, aujourd’hui dispersés aux quatre coins du monde, et par Raphaël et Madeleine, premiers relecteurs.

Merci aussi à la BnF et au trésor de ses numérisations, et à Véronique Yersin pour son enthousiasme, puisqu’elle est prête à donner aux éditions Macula une seconde vie aux feuillets de ce livre-journal déjà ouvert.

La lectrice voudrait aussi saluer le vendeur d’occasion de son quartier qui lui a permis d’acquérir, mi-avril, un Décaméron illustré, malgré la fermeture de tout et l’interdiction de se déplacer. Et pour finir, tirer le fil d’or de sa constellation Boccace, afin de rendre apparentes quelques coutures invisibles – entre autres : Russel Edson (et la revue l’Ours Blanc), Fabienne Verdier, Jacques Roubaud, Vinciane Desprez, le n° 167-8 de la revue Po&sie, Lydia Davis, Carl Andre, Samuel Beckett, Charles Reznikoff, Henri Matisse, Paul Klee et ses marionnettes, Federico Garcia Lorca, Erik Satie, Charles Baudelaire, John Keats, Antoine Sabatier de Castres, Jean de La Fontaine, Marguerite de Navarre, Antoine le Maçon, Laurent de Premierfait, Le Roman de la Dame à la Licorne (1349), Boèce, Béroul, et Marie de France, translatrice pionnière en langue française et merveilleuse anticipatrice.

Etc.


À toutes celles et tous ceux qui croient aux histoires et en savourent les ruses et les arrangements.
En attendant Nadeau s’est proposé d’héberger ce « néodécameron » abrégé : Décamérez ! est une traduction recréatrice improvisée, partagée avec vous au jour le jour, pour une drôle de saison.