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Journal de la littérature, des idées et des arts 04/10 – 17/10 2023

En attendant Nadeau

Wole Soyinka | Chroniques du pays des gens les plus heureux du monde
Sculpture (Detail), par El Anatsui, The Armory Show 2010 (Jack Shainman Gallery) © CC BY-SA 2.0/See-ming Lee/Flickr

Dans les catacombes du Nigeria

Comme ses œuvres précédentes, le troisième roman de Wole Soyinka, lauréat du prix Nobel de littérature en 1986, ne peut être dissocié des grandes interrogations politiques de notre époque. L’auteur s’y révèle intransigeant, violent et virtuose.

Éditorial

Croire en ce monde

« Le fait moderne, c’est que nous ne croyons plus en ce monde. » cette phrase de Gilles Deleuze extraite de L’image-temps, rapportée par Paul Bernard-Nouraud dans son article consacré à la parution des cours du philosophe sur la peinture résonne aujourd’hui de manière troublante. Comment croire en effet aujourd’hui en ce monde ? Pourtant, « [n]ous avons besoin d’une éthique ou d’une foi, ce qui fait rire les idiots ; ce n’est pas un besoin de croire à autre chose, mais un besoin de croire à ce monde-ci, dont les idiots font partie. » poursuit Deleuze.

Sommaire

Peter Sloterdijk
Le remords de Prométhée. Du don du feu à la destruction mondiale par le feu
par Pauline Hachette
Arthur Dreyfus
La troisième main
par Hugo Pradelle
Portrait Enrique Vila Matas Montevideo
Palacio Salvo (Montevideo, Uruguay) © CC BY 2.0/Rob Oo/Flickr

Tu n’as rien vu à Montevideo 

Au cœur du dernier roman d’Enrique Vila-Matas, qu’on pourrait qualifier d’écrivain « au troisième degré », se pose une question intime et décisive : comment continuer à écrire ? Ou plutôt : comment continuer d’écrire la difficulté de continuer à écrire ?
"Ruby Moonlight";, de Ali Cobby Eckermann
« Caina Putut, IIya, Wartanganha « , par Chern’ee Sutton (Mina, 2018) ( Chronologie de l’histoire de l’Australie, depuis les Aborigènes vivant aux côtés de la mégafaune jusqu’à l’Australie d’aujourd’hui.) © CC BY-SA 4.0/Skyring/WikiCommons

Deux récits pour une île

L’histoire d’un amour interdit à l’époque coloniale d’un côté, une fresque familiale de l’autre. Mêlant des mots aborigènes à la langue anglaise, deux autrices australiennes aux styles d’écriture opposés se rejoignent dans leur célébration de la nature et nous transportent.
Pierric Bailly La Foudre
Jura © CC BY-SA 2.0/rocketheo/Flickr

Attendre l’orage : entretien avec Pierric Bailly

Norbert Czarny s’est entretenu avec Pierric Bailly, auteur de La foudre, qui est à la fois un roman d’amour, un roman où le Jura est un personnage, un roman à suspense. Selon Pierric Bailly, le genre romanesque est le lieu de la complexité, c’est l’antidote aux slogans et aux discours réducteurs.
Sarah Chiche, Les alchimies - Goya Les désastres de la guerre
« Les désastres de la guerre ». Planche n°16, Francisco de Goya y Lucientes (1863) © Musée Occitanie

Songes de la raison

Venue d’une veine autobiographique, Sarah Chiche ne l’abandonne pas totalement dans son nouveau roman, Les alchimies, mais la croise avec le roman d’aventures et le burlesque. Au moment où la littérature semble saturée par la réalité sociale, une telle foi dans le romanesque se révèle tout à fait réjouissante.
Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
« La seule différence entre Dieu et moi, c’est que moi j’existe », Nietzsche (Murcia, 2008) © CC BY-SA 2.0/Silvia Siles/Flickr

Traduire Nietzsche

Le troisième tome des œuvres de Nietzsche dans la Pléiade comporte une nouvelle traduction d’Ainsi parlait Zarathoustra et regroupe, outre les œuvres publiées par Nietzsche et celles dont il avait préparé la publication, quantité de notes, de réflexions et d’ébauches confiées à divers carnets.
Denis Podalydès | En jouant, en écrivant. Molière & Cie
Denis Podalydès ® Bénédicte Roscot

Incarnation et désincarnation du comédien

Dans En jouant, en écrivant. Molière & Cie, Denis Podalydès restitue les expériences qui l’ont marqué et nous fait participer à la fabrique de son théâtre. C’est pour lui un exercice et un défi supplémentaire ; pour nous, un bonheur à ne pas manquer.
Eric Reinhardt Sarah, Suzanne et l'écrivain
Sac plastique (2005) © CC BY-SA 2.0/Dario/Flickr

Trois personnages en quête de récit

Dans le nouveau roman d’Éric Reinhardt, Sarah raconte à un écrivain son histoire, qui se voit transposée dans un récit dont la protagoniste s’appelle Susanne. Telle est la trame d’un ouvrage de facture peut-être trop classique et qui ne tient pas toutes ses promesses.
La théorie du chaos, Etienne Ghys
« Spectre cubiste » © CC BY 2.0/Filter Forge/Flickr

Peut-on entendre la forme d’un tambour ?

Depuis Newton, les spectres posent une question essentielle, celle de la relation entre la nature apparemment continue des phénomènes et leur structure sous-jacente discontinue ou discrète, comme préfèrent dire les mathématiciens. C’est cette question qu’aborde Nalini Anantharaman dans sa leçon inaugurale du Collège de France.
Aurélien Cressely | Par-delà l’oubli René Blum
« Portrait de René Blum », par Édouard Vuillard (1912) © CC0/WikiCommons

René Blum, la tragédie d’un frère

Aurélien Cressely s’est inspiré de la vie de René Blum, frère cadet de Léon Blum, assassiné à Auschwitz en 1942, pour écrire un premier roman qui aurait sans doute gagné à établir plus nettement la distinction entre l’imagination et le récit historique.
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Anouche Kunth, Tentatives d'effacement
Mariam veuve Lulédjian, née Markarian, cinquante-huit ans en 1931, « complètement abandonnée, vit de la charité de ses voisins ». FROFPRA, OA004_0311 (détail)

L’art du dépouillement

Dans Au bord de l’effacement, livre déjà remarqué aux Rendez-vous de l’Histoire de Blois, Anouche Kunth adopte une approche sensible au sort des exilés arméniens après 1920 en traquant les « incidents d’écriture » dans les archives de l’OFPRA.
Stig Dagerman
Stig Dagerman (1947) © Sune Stigsjöö/Europe

Stig Dagerman, à la lueur du centenaire

À l’occasion du centenaire de la naissance de Stig Dagerman (1923-1954), la revue Europe consacre à l’écrivain suédois un important dossier, qui comprend notamment deux poèmes inédits où se fait jour une écriture fragile, belle et sensible.
"Centennial Certificate MMA", Robert Rauschenberg Gertrude Stein
« Centennial Certificate MMA », Robert Rauschenberg (1969) © Metropolitan Museum of Art

Gertrude Stein et Pablo Picasso : ressemblances et répétitions

Une exposition traitant de la relation entre Gertrude Stein (1874-1946) et Pablo Picasso (1881-1973) ? Pas exactement. Ou pas seulement. Le rayonnement de l’œuvre de l’écrivaine américaine s’ancre dans sa reconnaissance d’une « ressemblance » entre ce qui se joue avec le cubisme de Picasso et ce qu’elle a poursuivi en littérature.
Robert Seethaler, Le café sans nom
Robert Seethaler ©Urban Zintel

À Vienne, on ne fait pas que valser

Perplexes devant le changement, inquiets de ne pas y trouver leur place, les personnages que Robert Seethaler met en scène dans Le café sans nom frôlent parfois le désespoir. Mais l’envie qu’ils ont de se laisser surprendre jusqu’au bout par le spectacle du monde et de ceux qui l’habitent finit par l’emporter.
Deleuze, Sur la peinture
« Trois études pour un auto-portrait », Francis Bacon (1967)(Détail 3) © CC BY 2.0/cea+/Flickr

Deleuze : quand « l’œil broute la surface »

La question picturale traverse toute la pensée de Gilles Deleuze. La publication par David Lapoujade du cours que le philosophe consacra au printemps 1981 à la peinture, en témoigne avec éclat. Il nous rappelle qu’elle a selon lui partie liée avec la catastrophe, elle-même inséparable d’une naissance, celle de la couleur.
La troisième main, Arthur Dreyfus
« Planche anatomique du corps humain », Andrew Fyfe © CC0/Qasim Zafar/Flickr

Un magnifique canard boiteux

Nous lisons La troisième main d’Arthur Dreyfus dans une forme de stupeur paralysante, emportés par une langue, un rythme, une sorte de furie fictionnelle qui, quels que soient ses défauts, nous immerge dans un univers étrange et décalé.
Sergio González Rodríguez, Les 43 d'Iguala
Manifestation à Iguala pour les « Les 43 d’Iguala » © Editions de L’Ogre

Sergio González Rodríguez, chroniqueur et voyant    

Qu’est-ce donc qu’un crime atroce ? Dans son dernier livre, Sergio González Rodríguez (1950-2017) dénonce la version officielle du massacre des 43 étudiants qui disparaissaient la nuit du 26 septembre 2014 dans l’État de Guerrero au Mexique. A Iguala, c’est toute l’ignominie du monde contemporain qui se reflète.
© Benoit Laureau

Les langues de l’Ogre : entretien avec Benoit Laureau

Benoit Laureau a fondé en 2015 les éditions de l’Ogre avec Aurélien Blanchard. Répondant aux questions de Jeanne Bacharach et de Pierre Tenne, il décrit pour En attendant Nadeau son métier d’éditeur et sa conception de la littérature.

L’humanité incendiaire, et après

Dans Le remords de Prométhée, en grande partie tiré d’une conférence, le philosophe allemand Peter Sloterdijk déroule une histoire de notre humanité centrée sur ses usages de la pyrotechnie. Il défend, sans tout à fait convaincre, un pragmatisme écologique social-démocrate.

Que pensent les penseurs du vivant ?

En s’appuyant sur la lecture critique de trois livres récents, la sociologue Alexandra Bidet et le professeur des écoles Vincent Rigoulet dénoncent trois travers des penseurs du vivant : ils caricaturent la modernité, occultent la production et souhaitent changer les manières de voir plutôt que les manières de faire.

Un cabinet de curiosités contemporain 

Toutes les intelligences du monde, le nouveau livre traduit de l’écrivain britannique James Bridle, séduit par la description qu’il propose des avancées des technologies émergentes. L’analyse critique n’est malheureusement qu’à peine ébauchée.
Consultez le premier volet du numéro :